Quand l’information sur Twitter est relayée par des bots
Les robots sont partout sur les réseaux sociaux. Ils peuvent servir à répondre à des questions posées par les internautes dans des discussions en temps réel (les chatbots). Ils fournissent des mises à jour automatiques sur l’actualité ou des événements. Mais ils peuvent également servir à répandre efficacement des fausses informations.
Le Twitter bot, un phénomène non négligeable
Le phénomène est massif, notamment sur Twitter : pas moins de 48 millions de ses utilisateurs sont des faux principalement constitués de bots, soit 15 % du total. Par comparaison, Facebook n’en comporte que 60 millions, sur plus de deux milliards d’usagers. La notoriété d’une marque ou d’une personnalité est tellement déterminante sur les réseaux sociaux que des sociétés ont fait florès dans la vente de faux comptes. C’est le cas de Devumi qui a vendu à ses divers clients plus de 200 millions de faux comptes sur Twitter.
Que font-ils sur la plateforme de microblogging ? Si on en croit la dernière étude du Pew Research Center, ils jouent un rôle considérable dans le partage de l’information. Pour ce faire, les chercheurs Stefan Wojcik, Solomon Messing, Aaron Smith, Lee Rainie et Paul Hitlin ont étudié un panel de 1,2 millions de tweets en langue anglaise sur une période de six semaines à l’été 2017. Ils ont utilisé une liste de 2 315 sites parmi les plus populaires portant sur les contenus pour adultes, le sport, l’actualité « people », les produits ou les services commerciaux, les groupes ou les organisations ainsi que l’actualité. Les chercheurs se sont servis de Botometer, un outil développé par l’Université de Caroline du Sud et l’Université d’Indiana, qui évalue la probabilité qu’un compte soit automatisé en se basant sur un certain nombre de critères (l’âge, la fréquence des publications, les caractéristiques de ses abonnés…).
Quand partage de liens rime avec bots
Résultat : 66 % des liens renvoyant vers des sites populaires sont postés par des « Twitter bots ». Leurs performances surclassent celles des humains puisque les 500 comptes de bots les plus actifs sont responsables de 22 % du partage de liens vers des sites d’actualité contre seulement 6 % pour leurs homologues humains. Un domaine comme le contenu pour adulte est quasiment l’apanage des bots. Suivent le sport (76%), les produits ou les services (73%) et les sites people, d’actualité et de culture (62%). Au bas de l’échelle, on trouve les liens associés à Twitter (50%).
Autre particularité des tweets de bots : ils sont friands des sites d’agrégation qui rassemblent des histoires glanées sur le web. Ils ont également une préférence pour les sites ne comportant pas de page de contact. En l’espèce, les chiffres sont édifiants. Alors que 90 % des sites retenus par l’étude disposent d’une telle page, 75 % des liens partagés par les bots renvoient vers des sites qui en sont dépourvus. Par contre, la politique est le domaine qui intéresse le moins les bots. De tous les liens renvoyant vers des sites populaires au contenu politique, 57 % ont été partagés par des Twitter Bots.
Quelles conclusions tirées de cette étude ? Étant donné la proéminence des bots sur le réseau social de l’oiseau bleu, on peut s’inquiéter de la qualité de l’information postée lorsque celle-ci provient de sites d’agrégation ou de sites ne contenant pas de page de contact alors que cette dernière est utile au lectorat pour faire un retour en cas d’erreur. L’information partagée est-elle pour autant de moins bonne qualité que celle propagée par les humains ? Cela reste à vérifier. Par ailleurs, le contenu partagé par les bots est-il idéologiquement marqué ? Si l’étude ne dégage pas d’inclination libérale ou conservatrice particulière de leur part, ils se révèlent centristes ou mixtes.
Article de Thierry Randretsa